Évangile dimanche 28 août

22e dimanche ordinaire (c)
Evangile de Jésus Christ selon st Luc (Lc 14, 1, 7-14 )

01 Un jour de sabbat, Jésus était entré dans la maison d’un chef des pharisiens pour y prendre son repas, et ces derniers l’observaient. 
07 Jésus dit une parabole aux invités lorsqu’il remarqua comment ils choisissaient les premières places, et il leur dit :
08 « Quand quelqu’un t’invite à des noces, ne va pas t’installer à la première place, de peur qu’il ait invité un autre plus considéré que toi.
09 Alors, celui qui vous a invités, toi et lui, viendra te dire : “Cède-lui ta place” ; et, à ce moment, tu iras, plein de honte, prendre la dernière place.
10 Au contraire, quand tu es invité, va te mettre à la dernière place. Alors, quand viendra celui qui t’a invité, il te dira : “Mon ami, avance plus haut”, et ce sera pour toi un honneur aux yeux de tous ceux qui seront à la table avec toi.
11 En effet, quiconque s’élève sera abaissé ; et qui s’abaisse sera élevé. »
12 Jésus disait aussi à celui qui l’avait invité : « Quand tu donnes un déjeuner ou un dîner, n’invite pas tes amis, ni tes frères, ni tes parents, ni de riches voisins ; sinon, eux aussi te rendraient l’invitation et ce serait pour toi un don en retour.
13 Au contraire, quand tu donnes une réception, invite des pauvres, des estropiés, des boiteux, des aveugles ;
14 heureux seras-tu, parce qu’ils n’ont rien à te donner en retour : cela te sera rendu à la résurrection des justes. »

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01 Un jour de sabbat, Jésus était entré dans la maison d’un chef des pharisiens pour y prendre son repas, et ces derniers l’observaient.

Le contexte de ce passage d’Evangile est donc triple : C’est un jour de Sabbat, jour sacré, jour de prière et d’abandon entre les mains de Dieu, jours de repos et de partage familial, un jour pour Dieu. En l’accueillant un tel jour, le chef des pharisiens lui fait honneur. Ensuite, Jésus est donc accueilli par des pharisiens. L’un d’entre eux, le chef, le reçoit, mais la fin de la phrase montre que les autres pharisiens sont là aussi. Cela montre que Jésus est bien un invité d’honneur : on invite d’autres convives avec Lui pour profiter de sa présence. Jésus est donc dans un milieu de stricte observance de la loi. Les quelques versets qui ne sont pas lus ici (V. 2 à 6) racontent justement une controverse sur l’observance du sabbat : peut-on faire une guérison le jour du sabbat ? Enfin, il est noté que les pharisiens l’observaient. On peut sentir une certaine défiance. Il y a d’autres endroits où il est clairement dit qu’ils voulaient le mettre à l’épreuve, mais ici ils se contentent de l’observer pour voir comment il se comporte, d’autant plus un jour de Sabbat. Jésus doit donc à la fois supporter la défiance, l’exigence et la révérence que ces hommes lui font. N’allons pas y voir du mal ou juger, ils font ce qu’ils font toujours : ils recherchent le bien à travers une observance particulière et intransigeante de la loi et veulent inviter tous les juifs à faire de même. Leur seul tort est de ne pas avoir reconnu en Jésus quelqu’un qui peut les enseigner mais plutôt quelqu’un à enseigner.

Et nous ? Saurons-nous laisser Jésus nous inviter à sortir de nos habitudes ? Saurons-nous nous laisser enseigner ? Un petit test très simple peut nous aider à voir où nous en sommes : pouvons-nous évoquer une chose que nous avons changé récemment dans notre mode de vie pour nous conformer un peu plus à la volonté de Dieu ? Et quel sera notre prochain objectif de conversion ?

07 Jésus dit une parabole aux invités lorsqu’il remarqua comment ils choisissaient les premières places, et il leur dit :

Deux choses sont importantes dans cette introduction : tout d’abord, Jésus observe le comportement de ceux qui sont autour de lui pour les enseigner à partir de ce qu’ils vivent. Cela n’a rien d’exceptionnel ; les pharisiens faisaient de même, comme nous l’avons expliqué au verset précédent. Mais cela nous apprend que Jésus ne se comportait pas comme sachant tout et faisant la leçon du haut sa connaissance parfaite de toute chose. Jésus n’est pas d’abord venu pour nous donner des leçons mais pour rencontrer des personnes et les accompagner vers la sainteté. Cela nous sera très utile pour comprendre la suite. Ensuite, Jésus raconte une parabole. C’est sans doute parce qu’il avait l’habitude d’agir ainsi ; c’est aussi pour que la leçon soit plus douce, mais surtout nous savons que toutes ces paraboles nous parlent, non seulement de notre vie quotidienne de disciples, mais aussi toujours de Dieu et du Salut. Il nous faudra garder cela à l’esprit pour bien interpréter cette parabole.

Et nous ? Quand Dieu nous envoie vers nos frères, y allons-nous comme des maîtres détenteurs de vérités toutes faites, ou bien avons-nous la douceur et la délicatesse d’accueillir et d’accompagner nos frères ? Et quand c’est lui qui nous enseigne par sa Parole ou par nos frères, est-ce que nous essayons de dépasser les apparences pour scruter en profondeur et en vérité ce qu’il veut nous dire ?

08 « Quand quelqu’un t’invite à des noces, ne va pas t’installer à la première place,

Voici que Jésus change le contexte, il ne s’agit plus d’un repas de sabbat et de pharisiens, mais d’un repas de noces. Il est toujours question de première place. On peut redire qu’il ne veut pas prendre de front ceux qui sont là, mais on peut aussi regarder ce qu’il dit par ailleurs des noces :
02 « Le royaume des Cieux est comparable à un roi qui célébra les noces de son fils. (Mt 22, 2)
Voici que les noces concernent donc le fils du Roi, c’est-à-dire le fils de Dieu, Jésus.
« Alors, le royaume des Cieux sera comparable à dix jeunes filles invitées à des noces, qui prirent leur lampe pour sortir à la rencontre de l’époux. (Mt 25, 1)
Si les noces sont celles du fils de Dieu, l’époux, cette parabole des dix jeunes filles ne mentionnent jamais d’épouse, mais elle parle de ces dix jeunes filles qui vont à la rencontre de l’époux. Ce sont elles qui représentent l’épouse, non que Jésus ne prône la polygamie bien sûr, mais qu’elles représentent l’humanité, ou mieux l’Eglise, peuple des sauvés, que le Christ vient épouser en s’incarnant. Le livre de l’Apocalypse nous le confirme bien :
06 Alors j’entendis comme la voix d’une foule immense, comme la voix des grandes eaux, ou celle de violents coups de tonnerre. Elle proclamait : « Alléluia ! Il règne, le Seigneur notre Dieu, le Souverain de l’univers.
07 Soyons dans la joie, exultons, et rendons gloire à Dieu ! Car elles sont venues, les Noces de l’Agneau, et pour lui son épouse a revêtu sa parure. (Ap 19, 6-7)
La foule immense sur laquelle le Seigneur règne, c’est évidemment l’Eglise, et viennent les noces, et la foule est parée comme une épouse.
Jésus parle donc de quelqu’un, celui que les pharisiens ne connaissent pas, le Père. Celui-ci les invite aux noces de son Fils ; c’est pour cela qu’il s’est fait l’un de nous, il est venu s’unir à nous en prenant notre humanité.
Mais voici qu’il ne faut pas prendre la première place, pourquoi ? Tout d’abord, cela ne nous revient pas mais il revient à Dieu de donner la place à chacun, souvenons-nous de l’épisode des fils de Zébédée :
20 Alors la mère des fils de Zébédée s’approcha de Jésus avec ses fils Jacques et Jean, et elle se prosterna pour lui faire une demande.
21 Jésus lui dit : « Que veux-tu ? » Elle répondit : « Ordonne que mes deux fils que voici siègent, l’un à ta droite et l’autre à ta gauche, dans ton Royaume. »
22 Jésus répondit : « Vous ne savez pas ce que vous demandez. Pouvez-vous boire la coupe que je vais boire ? » Ils lui disent : « Nous le pouvons. »
23 Il leur dit : « Ma coupe, vous la boirez ; quant à siéger à ma droite et à ma gauche, ce n’est pas à moi de l’accorder ; il y a ceux pour qui cela est préparé par mon Père. » (Mt 20, 20-23)

Ils veulent prendre les premières places mais Jésus leur fait remarquer le caractère déplacé de cette demande avant de renvoyer vers la volonté de son Père.
La deuxième raison vient dans les versets suivants…

Alors ? Pouvons-nous accepter de dépendre de la volonté de Dieu qui nous donnera la place qui nous est la plus adaptée ? Sommes-nous déjà bienheureux de faire partie de cette Eglise, épouse du Christ et ainsi intimement liée à Lui ? Est-ce que l’Amour de Dieu nous suffit, sans que nous n’allions chercher des honneurs en plus ?

de peur qu’il ait invité un autre plus considéré que toi.

Si les invités représentent l’Eglise, le peuple des sauvés, qui d’autres le Seigneur pourrait-il avoir invité, de plus importants ? Ne faisons pas de contresens ! Ce ne sont pas les invités qui représentent l’Eglise, mais bien l’épouse. Alors qui sont les invités ? Tous ceux qui sont appelés à ses noces mais ne les ont pas encore vécues. C’est l’Eglise du ciel qui est l’épouse, mais nous ici-bas, qui ne sommes pas encore parfaitement unis au Christ, nous sommes invités, pas encore épousés… De ce point de vue, les juifs, le peuple de l’alliance pensaient non seulement être les invités mais même les seuls invités : ils sont le peuple choisi, le seul que Dieu sauvera. C’est pourquoi la descente de l’Esprit Saint sur les païens, par exemple sur le centurion Corneille dans les actes des apôtres, les a tellement surpris :
44 Pierre parlait encore quand l’Esprit Saint descendit sur tous ceux qui écoutaient la Parole.
45 Les croyants qui accompagnaient Pierre, et qui étaient juifs d’origine, furent stupéfaits de voir que, même sur les nations, le don de l’Esprit Saint avait été répandu. (Ac 10, 44-45)
Ainsi donc, il ne s’agit plus des pharisiens ou le peuple juif, mais des païens convertis. Mais on ne peut pas s’arrêter là car Jésus lui-même va plus loin pour que nous non plus, fils de l’Eglise, nous ne nous croyons pas automatiquement sauvés. Ainsi dit-il :
Jésus leur dit : « Amen, je vous le déclare : les publicains et les prostituées vous précèdent dans le royaume de Dieu.
32 Car Jean le Baptiste est venu à vous sur le chemin de la justice, et vous n’avez pas cru à sa parole ; mais les publicains et les prostituées y ont cru. Tandis que vous, après avoir vu cela, vous ne vous êtes même pas repentis plus tard pour croire à sa parole.
L’avertissement est donc clair : ceux qui précèdent, ou ceux qui auront les premières places, ne les auront pas à cause de leur naissance ou d’une quelconque appartenance mais à cause de leur foi et de leur capacité à se repentir, se convertir et à croire.

Et nous ? Où en sommes-nous dans notre chemin de conversion ? Avons-nous tendance à croire à un salut automatique en raison de notre baptême (naissance à la vie surnaturelle) ou de notre confirmation (incorporation au peuple de Dieu) comme si nous n’avions pas besoin de nous convertir ?

09 Alors, celui qui vous a invités, toi et lui, viendra te dire : “Cède-lui ta place” ;

Le Seigneur dit : « celui qui », il reste toujours aussi évasif, il renvoie vers celui qui n’est pas connu, il nous parle du Père. C’est lui qui a invité les deux, c’est-à-dire les juifs et les païens, ou les publicains et les prostituées, bref ceux qui se sont convertis à la Parole et qui précèderont les pharisiens dans le Royaume des cieux. Mais maintenant, il demande aux uns de céder la place aux autres. C’est ce que disait le Christ à la fin de la parabole des vignerons homicides :
42 Jésus leur dit : « N’avez-vous jamais lu dans les Écritures : La pierre qu’ont rejetée les bâtisseurs est devenue la pierre d’angle : c’est là l’œuvre du Seigneur, la merveille devant nos yeux !
43 Aussi, je vous le dis : Le royaume de Dieu vous sera enlevé pour être donné à une nation qui lui fera produire ses fruits. (…)
45 En entendant les paraboles de Jésus, les grands prêtres et les pharisiens avaient bien compris qu’il parlait d’eux. (Mt 21, 42-43,45)
L’Eglise, c’est à dire le peuple qui remplacera le premier peuple infidèle, est donc composée de tous les hommes qui, quelle que soit leur origine, se sont convertis à la Parole du Seigneur. C’est elle l’« invitée plus considérée » car elle n’est pas seulement un peuple élu, elle est le peuple que Dieu lui-même a racheté au prix de son sang :
18 Vous le savez : ce n’est pas par des biens corruptibles, l’argent ou l’or, que vous avez été rachetés de la conduite superficielle héritée de vos pères ;
19 mais c’est par un sang précieux, celui d’un agneau sans défaut et sans tache, le Christ. (1 Pi 1, 18-19)
Elle est aussi le corps du Christ :
27 Or, vous êtes corps du Christ et, chacun pour votre part, vous êtes membres de ce corps. (1 Co 12, 27)
C’est pourquoi cette alliance-là sera éternelle comme Dieu lui-même puisque l’alliance va de Dieu (éternel) à l’Eglise, corps du Christ (éternel). Non seulement la première alliance, le premier peuple doivent « céder la place », mais nous savons que la nouvelle alliance, elle, ne cèdera jamais puisqu’elle est éternelle.

Et nous ? Ne faisons pas la même erreur que les pharisiens, en croyant que l’appartenance à l’Eglise suffit au Salut car en fait, nous n’appartenons vraiment à l’Eglise que si nous croyons et que notre foi nous pousse à la conversion de tous les instants.

et, à ce moment, tu iras, plein de honte, prendre la dernière place.

N’oublions pas que le Seigneur Jésus a parlé des « publicains et des prostitués » qui précèdent dans le Royaume des cieux. Prendre la dernière place est donc accepter d’être considéré comme inférieur à ces pécheurs publics ! voilà la honte dont il est question.

Et nous ? Savons-nous combien nous sommes pécheurs ? Sommes-nous conscients de la place où nous devrions être ? Saurons-nous nous en remettre à la miséricorde de Dieu pour que notre honte soit changée en joie de se savoir sauvés, de se savoir aimés ?

10 Au contraire, quand tu es invité, va te mettre à la dernière place.

Voici qui est plus habituel : Jésus qui invite à l’humilité et au choix de la dernière place. Celle-ci n’était honteuse que parce qu’elle n’était pas choisie mais subie. Elle était aussi honteuse parce qu’elle n’avait plus aucune espérance de progrès ou de rédemption, le maître lui-même avait demander de céder la place. Mais maintenant on parle d’une dernière place choisie comme telle. Dans l’Evangile on la rencontre souventsous une forme ou une autre :
03 « Heureux les pauvres de cœur, car le royaume des Cieux est à eux.
04 Heureux ceux qui pleurent, car ils seront consolés. (…)
10 Heureux ceux qui sont persécutés pour la justice, car le royaume des Cieux est à eux.
11 Heureux êtes-vous si l’on vous insulte, si l’on vous persécute et si l’on dit faussement toute sorte de mal contre vous, à cause de moi.
12 Réjouissez-vous, soyez dans l’allégresse, car votre récompense est grande dans les cieux ! (Mt 5, 3-4,10-12)
Au moins quatre béatitudes sont pour des personnes qui choisissent une dernière place :
“Amen, je vous le dis : chaque fois que vous l’avez fait à l’un de ces plus petits de mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait.”(Mt 25, 40)
Le Christ lui aussi s’identifie au plus petit, au dernier :
13 Vous m’appelez “Maître” et “Seigneur”, et vous avez raison, car vraiment je le suis.
14 Si donc moi, le Seigneur et le Maître, je vous ai lavé les pieds, vous aussi, vous devez vous laver les pieds les uns aux autres.
15 C’est un exemple que je vous ai donné afin que vous fassiez, vous aussi, comme j’ai fait pour vous. (Jn 13, 13-15)
Il choisit même de s’identifier aux esclaves et d’ailleurs il dit ailleurs :
25 Jésus les appela et dit : « Vous le savez : les chefs des nations les commandent en maîtres, et les grands font sentir leur pouvoir.
26 Parmi vous, il ne devra pas en être ainsi : celui qui veut devenir grand parmi vous sera votre serviteur ;
27 et celui qui veut être parmi vous le premier sera votre esclave.
28 Ainsi, le Fils de l’homme n’est pas venu pour être servi, mais pour servir, et donner sa vie en rançon pour la multitude. »
Et ce sont là que quelques exemples. C’est une constante : la bonne place pour un disciple du Christ est la dernière. Mais rappelons-le, cette dernière place n’est pas subie, elle est choisie car nous avons conscience de notre faiblesse et de notre péché, bref de notre indignité dont seul Dieu peut nous sortir.

Et nous ? Quels sont les honneurs et les premières places auxquels nous tenons ? Quelles dernières places sommes-nous prêts non seulement à accepter mais plus encore à choisir ?

Alors, quand viendra celui qui t’a invité, il te dira : “Mon ami, avance plus haut”,

Et justement, c’est bien du Père que Jésus continue de nous parler par des mots évasifs. Nous apprenons qu’il viendra. C’est notre espérance qui transforme cette perspective en certitude. Nous entendons avec joie qu’Il nous appelle « mon ami ». Voilà l’intimité, l’amour que nous sommes appelés à vivre avec ce Dieu dons le Fils nous a dit :
15 Je ne vous appelle plus serviteurs, car le serviteur ne sait pas ce que fait son maître ; je vous appelle mes amis, car tout ce que j’ai entendu de mon Père, je vous l’ai fait connaître. (Jn 15, 15)
Enfin nous recevons cette promesse : « avance plus haut ». Ce que nous ne pouvons revendiquer par nos propres forces ou mérites, nous le recevons par grâce, par amitié de Dieu, qui peut seul, nous sauver.

Et nous ? Avons-nous une certitude assurée de la venue du Seigneur ? Sommes-nous prêts à recevoir toute grâce de lui sans rien revendiquer ? Serons-nous donc des amis plutôt que des quémandeurs, ou des récriminants ?

et ce sera pour toi un honneur aux yeux de tous ceux qui seront à la table avec toi.

L’honneur ne vient donc pas de ce que nous faisons mais de ce que Dieu fait pour nous. Notons aussi que nous ne serons pas seuls à cette table. L’histoire du Salut est pour nous une histoire de communion avec Dieu mais aussi avec nos frères.

Et nous ? Acceptons-nous cette entière dépendance de la volonté de Dieu ? Nous réjouissons-nous de retrouver tous nos frères autour de cette table ? Y a-t-il un frère que nous excluons ? Comment travailler à une réconciliation avec lui ?

11 En effet, quiconque s’élève sera abaissé ; et qui s’abaisse sera élevé. »

Voici un autre enseignement récurrent. Par exemple, dans les mises en garde contre l’orgueil des pharisiens :
08 Pour vous, ne vous faites pas donner le titre de Rabbi, car vous n’avez qu’un seul maître pour vous enseigner, et vous êtes tous frères.
09 Ne donnez à personne sur terre le nom de père, car vous n’avez qu’un seul Père, celui qui est aux cieux.
10 Ne vous faites pas non plus donner le titre de maîtres, car vous n’avez qu’un seul maître, le Christ.
11 Le plus grand parmi vous sera votre serviteur.
2 Qui s’élèvera sera abaissé, qui s’abaissera sera élevé. (Mt 23, 8-12)
Ou encore dans la parabole du pharisien et du publicain :
14 Je vous le déclare : quand ce dernier redescendit dans sa maison, c’est lui qui était devenu un homme juste, plutôt que l’autre. Qui s’élève sera abaissé ; qui s’abaisse sera élevé. »
Là encore, c’est l’idée de notre faiblesse et de notre indignité qui fait que vouloir s’élever est vain et même néfaste et nous entrainera à la ruine, tandis que la miséricorde et la bonté de Dieu vient rechercher même le petit, l’égaré pour le relever, le grandir et le retrouver. (Cf. les trois paraboles de la miséricorde du chapitre 15 de st Luc : la brebis perdue, la drachme perdue, le fils prodigue).

Et nous ? Seule une entière confiance dans la miséricorde de Dieu et une vraie conscience de notre condition pécheresse nous permettront de passer à travers l’orgueil et le désespoir pour accueillir l’Amour et le Salut de Dieu, où en sommes-nous ?

12 Jésus disait aussi à celui qui l’avait invité : « Quand tu donnes un déjeuner ou un dîner, n’invite pas tes amis, ni tes frères, ni tes parents, ni de riches voisins ;

Sans doute avez-vous remarqué que le ton change. Ici il n’est plus question de parabole ou de noces ou de « celui qui invite ». Il s’agit d’un simple dîner et l’interpellation est directe. Jésus n’est donc plus en train de parler du Royaume, de Dieu ou de la vie éternelle. Maintenant, Il parle des hommes. Après avoir exposé la part de Dieu : Il invite, il demande de céder la place, il fait monter plus haut… le voici qui parle de la part des hommes : ce qu’ils font et comment ils doivent le faire. Il est question d’hospitalité (« quand tu donnes un déjeuner ou un diner ») de fraternité et de bon voisinage. D’un point de vue humain, ce ne sont que de bonnes choses, d’ailleurs Jésus ne les condamne pas. Masi nous sommes là à évoquer l’attitude juste d’un croyant qui répond à la grâce de Dieu évoquée dans la parabole. Ce qui est bon aux yeux des hommes n’est donc pas suffisant. Jésus ne le condamne pas mais il conseille de faire autre chose ou de faire autrement, de faire plus et mieux.

Et nous ? Dans nos relations avec nos familles, nos amis et nos voisins, nous en tenons-nous à ce qui est juste et bien, ou saurons-nous aller, au-delà de la justice, à la bonté, au-delà du bien, à la miséricorde et à la charité ?

sinon, eux aussi te rendraient l’invitation et ce serait pour toi un don en retour.

Voici que Jésus parle de réciprocité et d’équité, ce qui bien sûr sont de saines valeurs. Pourtant, Jésus n’est pas venu nous délivrer un code de bonne conduite ou un manuel de morale sociale. Il ne veut pas nous inculquer des valeurs, nous sommes capables de faire cela tout seuls (encore faut-il le faire…) Il est venu nous appeler à la vertu et même mieux, à la sainteté. La réciprocité, qui nous permet d’établir une saine égalité, est alors remplacée par le service, une attitude qui nous pousse à nous donner à l’autre et pour l’autre. L’équité, qui permet à chacun d’avoir sa juste place, est alors remplacée par l’amour, la charité qui est le don total de soi pour celui qu’on aime. Non, Jésus ne veut pas que nous soyons des gens bien, c’est tout à fait insuffisant. Il veut que nous soyons des saints :
15 mais, à l’exemple du Dieu saint qui vous a appelés, devenez saints, vous aussi, dans toute votre conduite,
16 puisqu’il est écrit : Vous serez saints, car moi, je suis saint. (1 Pi 1, 15-16)
Et cette sainteté établit un lien direct avec Dieu, pour que nous soyons vraiment à son image et à sa ressemblance (cf Gn 1, 26). Jésus ne prétend pas que la justice soit mauvaise, il montre qu’il y a tellement plus et mieux que seulement la justice.

Et nous ? Depuis notre baptême, nous avons reçu la vocation universelle à la sainteté, qu’en faisons-nous ? Pouvons-nous identifier au moins un domaine dans notre vie où nous allons plus loin que la seule justice ou même le seul bien pour rechercher la charité et la sainteté ?

13 Au contraire, quand tu donnes une réception, invite des pauvres, des estropiés, des boiteux, des aveugles ;

Cette invitation nous renvoie vers la parabole des invités aux noces :
16 Jésus lui dit : « Un homme donnait un grand dîner, et il avait invité beaucoup de monde.
17 À l’heure du dîner, il envoya son serviteur dire aux invités : “Venez, tout est prêt.”
18 Mais ils se mirent tous, unanimement, à s’excuser. Le premier lui dit : “J’ai acheté un champ, et je suis obligé d’aller le voir ; je t’en prie, excuse-moi.”
19 Un autre dit : “J’ai acheté cinq paires de bœufs, et je pars les essayer ; je t’en prie, excuse-moi.”
20 Un troisième dit : “Je viens de me marier, et c’est pourquoi je ne peux pas venir.”
21 De retour, le serviteur rapporta ces paroles à son maître. Alors, pris de colère, le maître de maison dit à son serviteur : “Dépêche-toi d’aller sur les places et dans les rues de la ville ; les pauvres, les estropiés, les aveugles et les boiteux, amène-les ici.
Mais plus profondément, elle nous évoque les prophéties et la façon dont Jésus se présente comme le messie annoncé :
02 Jean le Baptiste entendit parler, dans sa prison, des œuvres réalisées par le Christ. Il lui envoya ses disciples et, par eux,
03 lui demanda : « Es-tu celui qui doit venir, ou devons-nous en attendre un autre ? »
04 Jésus leur répondit : « Allez annoncer à Jean ce que vous entendez et voyez :
05 Les aveugles retrouvent la vue, et les boiteux marchent, les lépreux sont purifiés, et les sourds entendent, les morts ressuscitent, et les pauvres reçoivent la Bonne Nouvelle.
06 Heureux celui pour qui je ne suis pas une occasion de chute ! » (Mt 11, 2-6)
Quand on demande à Jésus s’il est celui qui doit venir, c’est-à-dire le messie, il ne répond pas par autre chose que la description de ce qu’il fait, il soigne les aveugles, les boiteux … Ceux qu’il recommande d’inviter. Ainsi ceux que le Christ est venu sauver sont ceux qu’il faut inviter… Ceux que le Christ invite à vivre avec Lui pour l’éternité…

Et nous ? Nous devons donc faire à notre niveau, ce que Dieu fait, c’est à dire être à son image. Autrement dit :
Nous devons aimer comme Il aime :
12 Mon commandement, le voici : Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés. (Jn 15, 12)
Nous devons servir comme il sert :
14 Si donc moi, le Seigneur et le Maître, je vous ai lavé les pieds, vous aussi, vous devez vous laver les pieds les uns aux autres.
15 C’est un exemple que je vous ai donné afin que vous fassiez, vous aussi, comme j’ai fait pour vous. (Jn 13, 14-15)

14 heureux seras-tu, parce qu’ils n’ont rien à te donner en retour : cela te sera rendu à la résurrection des justes. »

L’idéal qui est fixé ici est celui de la gratuité totale : « rien en retour ». Mais aussitôt un élément nouveau intervient : la gratuité totale sur cette terre, c’est-à-dire le désintéressement total sur cette terre ne signifie pas qu’il ne puisse y avoir l’espérance d’une récompense dans les cieux. Est-ce à dire qu’il n’y a pas de gratuité ? Si bien sûr, car nous devons être conscients que nous ne pouvons rien mériter en propre, rien exiger de Dieu. Nous espérons donc une récompense qui ne nous est pas due mais octroyée par miséricorde de Dieu. Lui peut décider de nous reconnaître un mérite là où en fait : « “Nous sommes de simples serviteurs : nous n’avons fait que notre devoir.” » (Lc 17, 10)

Et nous ? Acceptons-nous d’être de tels serviteurs, savons-nous que nous ne méritons rien de la part de Dieu, sommes-nous prêts à agir avec une charité pleine de gratuité pour nos frères, à l’image de notre Père des cieux ?

En guise de conclusion :
un texte, en apparence anodin et un peu redondant de conseils de vie en société, se révèle ici être beaucoup plus que cela. La première partie nous parle de la grâce de Dieu, de son appel, de son Salut, de son Royaume. La seconde partie nous apprend à devenir des images de Dieu dans notre manière d’être, d’agir et d’aimer. Tout cela nous permet d’établir une relation d’intimité et d’amour avec notre Dieu pour être prêts à recevoir sa grâce, celle que nous ne méritons pas mais qu’il nous donnera dans sa miséricorde. Bien que nous n’en soyons pas dignes et que nous ne pourrons jamais le devenir par nos propres forces, préparons-nous donc à devenir des Fils à son image :
La foi nous fait croire que c’est ce que Dieu veut ;
L’espérance nous fait déjà contempler que c’est ce qu’il fera ;
La charité nous comble de la joie d’être ainsi destinés à ne faire qu’un, tous ensemble, avec Lui.