Évangile dimanche 30 octobre

Lectio Divina du 30 octobre 2022 : 31e  ordinaire (C)

Évangile de Jésus Christ selon st Luc (Lc 19, 1-10)

01 Entré dans la ville de Jéricho, Jésus la traversait.
02 Or, il y avait un homme du nom de Zachée ; il était le chef des collecteurs d’impôts, et c’était quelqu’un de riche.
03 Il cherchait à voir qui était Jésus, mais il ne le pouvait pas à cause de la foule, car il était de petite taille.
04 Il courut donc en avant et grimpa sur un sycomore pour voir Jésus qui allait passer par là.
05 Arrivé à cet endroit, Jésus leva les yeux et lui dit : « Zachée, descends vite : aujourd’hui il faut que j’aille demeurer dans ta maison. »
06 Vite, il descendit et reçut Jésus avec joie.
07 Voyant cela, tous récriminaient : « Il est allé loger chez un homme qui est un pécheur. »
08 Zachée, debout, s’adressa au Seigneur : « Voici, Seigneur : je fais don aux pauvres de la moitié de mes biens, et si j’ai fait du tort à quelqu’un, je vais lui rendre quatre fois plus. »
09 Alors Jésus dit à son sujet : « Aujourd’hui, le salut est arrivé pour cette maison, car lui aussi est un fils d’Abraham.
10 En effet, le Fils de l’homme est venu chercher et sauver ce qui était perdu. »

Lecture ligne à ligne

01 Entré dans la ville de Jéricho, Jésus la traversait.

La fin du chapitre précédent (Lc 18, 35-43) présentait l’arrivée de Jésus à Jéricho et la guérison d’un aveugle. Ce passage trouve des parallèles dans les deux autres évangiles synoptiques : Mt 20, 29-34 et Mc 10, 46- 52 qui nous révèlent même le nom de cet aveugle, Bartimée, le fils de Timée. Les autres évangiles placent la guérison de l’aveugle à la sortie de Jéricho tandis que Luc la met à son entrée, car ensuite vient la traversée de Jéricho et la rencontre que nous allons lire, avec Zachée.
Quoiqu’il en soit, nous notons deux choses : Jéricho marque la fin de la section pérégrine de St Luc, tout comme le changement des parties des évangiles de Mathieu et de Marc, la montée à Jérusalem, les rameaux et les dernières controverses qui suivent sont l’introduction directe à la Passion.
Jéricho a déjà été évoqué dans l’évangile de St Luc, dans la parabole dite du bon Samaritain :
30 Jésus reprit la parole : « Un homme descendait de Jérusalem à Jéricho, et il tomba sur des bandits ; ceux-ci, après l’avoir dépouillé et roué de coups, s’en allèrent, le laissant à moitié mort. (Lc 10, 30)
Jésus a choisi de mettre l’attaque des bandits et la quasi-mort de son personnage alors qu’il descend de Jérusalem à Jéricho. Au contraire, lui monte de Jéricho à Jérusalem, et cette montée est synonyme de guérison pour l’aveugle et de conversion pour Zachée. Quant à Jésus lui-même cette montée finira bien sûr par sa passion mais plus encore par sa résurrection et sa montée au ciel. La symbolique de la montée comme du progrès et du Salut ou de la descente comme de la déchéance et de la perdition est claire. Cependant, il ne faut pas oublier que pour Bartimée, il a fallu affronter la foule qui voulait le faire taire. Pour Zachée, il a fallu affronter la foule qui récriminait et le traitait de pécheur. Pour Jésus, il a fallu affronter la foule qui l’a condamné et crucifié. Nous le savons, notre Espérance nous entrainera jusqu’auprès de Dieu mais à travers des souffrances et des persécutions surmontées, Jésus en avait averti ses disciples :
29 Jésus déclara : « Amen, je vous le dis : nul n’aura quitté, à cause de moi et de l’Évangile, une maison, des frères, des sœurs, une mère, un père, des enfants ou une terre
30 sans qu’il reçoive, en ce temps déjà, le centuple : maisons, frères, sœurs, mères, enfants et terres, avec des persécutions, et, dans le monde à venir, la vie éternelle. (Mc 10, 29-30)

Et nous ? Avons-nous ce désir d’ascension ? Voulons-nous suivre Jésus vers le ciel et vers son Père ? Sommes-nous prêts à passer par la Croix pour cela ?

02 Or, il y avait un homme du nom de Zachée ;

Contrairement à Saint Marc qui avait révélé le nom de l’aveugle, Bartimée, Saint Luc ne l’a pas nommé. Pourtant, juste après, il raconte l’histoire de ce collecteur d’impôts et il nous dit son nom. Celui-ci aurait-il de l’importance ? Une des étymologies de ce nom pourrait être “le pur” ce qui se référerait alors, soit à la fin de l’histoire quand l’homme promet de réparer le mal qu’il a fait et de partager son bien avec les pauvres, soit à ce que Jésus a déjà vu en Lui, qui pourtant, n’est pas manifeste. Il est pécheur mais il y a en lui autre chose que Jésus révèle plus loin (V 9 “lui aussi est un fils d’Abraham”).
Mais l’autre origine du mot est plus intéressante encore : Zachée pourrait être un diminutif de Zacharie, nom qui signifie “Dieu se souvient”. Ainsi, le père de Jean Baptiste a vu sa prière exaucée, il est devenu Père, Dieu s’est souvenu de lui ! Un diminutif pour un homme de petite taille, Dieu se souvient de celui que le Christ a appelé malgré son péché car “il s’est souvenu que lui aussi est un fils d’Abraham”… Tout concorde !

Et nous ? Croyons-nous que Dieu se souvienne de nous ? Y a-t-il des demandes que nous avons faites à Dieu qui ne nous semblent pas exaucées ? Persévérons-nous dans la demande en vérifiant qu’elle soit juste ? Ou acceptons-nous de changer d’objectif pour mieux correspondre à la volonté de Dieu sur nous ? Où en sont notre espérance et notre confiance ?

il était le chef des collecteurs d’impôts,

Ce n’est pas le premier collecteur d’impôts que Jésus remarque et appelle :
Jésus sortit et remarqua un publicain (c’est-à-dire un collecteur d’impôts) du nom de Lévi assis au bureau des impôts. Il lui dit : « Suis-moi. » (Lc 5, 27)
Ce que st Matthieu nous dit de la même manière mais avec un autre nom…
9 Jésus partit de là et vit, en passant, un homme, du nom de Matthieu, assis à son bureau de collecteur d’impôts. Il lui dit : « Suis-moi. » (Mt 9, 9)
Et Jésus avait d’ailleurs prévenu :
Jésus leur dit : « Amen, je vous le déclare : les publicains (collecteurs d’impôts) et les prostituées vous précèdent dans le royaume de Dieu. (Mt 21, 31)

Et nous ? Comprenons-nous ce qui est en jeu : Lévi ou Matthieu est devenu un disciple, Zachée est converti par Jésus, les publicains nous précèdent dans le royaume… quel que soit notre péché, il est temps d’entendre l’appel de Dieu, sans désespérer mais sans attendre non plus et sans différer notre réponse !

et c’était quelqu’un de riche.

Bien souvent les riches sont mis en garde par Jésus : paraboles du riche insensé (Lc 12, 16-21) ou du riche et du pauvre Lazare (Lc 16, 19-31), mais aussi le jeune homme riche (Lc 18, 18-30) ou la pauvre veuve (Lc 21, 1-4). Ici il rapproche le fait qu’il est le chef des collecteurs d’impôts, donc collaborateurs de l’envahisseur et publicain, pécheur notoire, ce qui semble aller dans le sens de la mise en garde. Pourtant il est celui que Jésus va appeler, convertir et sauver… Il ne faut donc pas aller trop vite en besogne.
Rappelons-nous d’ailleurs que Jésus posa son regard sur le jeune homme riche et l’aima. Rappelons-nous qu’il prend l’exemple d’un maitre très riche qui fait grâce à ses serviteurs (Mt 18, 21-35), et ainsi dans la parabole des ouvriers de la onzième heure est-il encore question d’un maître riche qui fait bon usage de ses biens (Mt 20, 1-16).
Le problème n’est donc pas la richesse mais ce qu’on en fait ?

Et nous ? Comment utilisons-nous les biens que Dieu nous a permis de recevoir ou de gagner ? Avons-nous la pauvreté au cœur comme nous le recommande la première béatitude (Mt 5, 3) ? Avons-nous tendance à généraliser et à juger : les pauvres sont … et tous les riches sont… ?

03 Il cherchait à voir qui était Jésus,

Voici que la grâce l’avait déjà touché : il était désireux du sauveur. Bien sûr, c’était peut-être pour des mauvaises raisons : curiosité, convoitise… mais même dans ce cas-là, il désirait quelque chose de bon. Rappelons-nous la réponse de Sainte Thérèse d’Avila encore toute jeune et partie seule avec un frère et un cousin en croisade, rattrapée et interrogée sur cette folie par des adultes de sa famille, elle dit tout simplement : “je veux voir Dieu” ! C’est donc là le désir des saints, et quelles qu’en soient les motivations, cela reste un saint désir.

Et nous ? Est-ce que nous voulons voir Dieu ? Est-ce que nous en donnons les moyens ? Savons-nous reconnaître sa présence dans nos vies ? Et comment ? (Quand je préparais des jeunes à la Confirmation ou à la profession de foi, je leur demandais souvent de me dire où l’on peut trouver Jésus aujourd’hui, et j’attendais au moins dix réponses : au ciel, dans les sacrements, dans sa Parole… saurez-vous m’en dire 10 vous aussi ?)

mais il ne le pouvait pas à cause de la foule, car il était de petite taille.

Il y a donc deux raisons à cette impossibilité : une matérielle, sa petite taille et une sociale, la foule. Pour ce qui est du problème matériel, c’est l’ingéniosité humaine qui va y remédier. Pour le problème social, c’est plus compliqué. Ce problème, c’est la foule. C’est déjà la foule qui voulait empêcher Bartimée de demander de l’aide à Jésus :
38 Il s’écria : « Jésus, fils de David, prends pitié de moi ! »
39 Ceux qui marchaient en tête le rabrouaient pour le faire taire. Mais lui criait de plus belle : « Fils de David, prends pitié de moi ! » (Lc 18, 38-39)
Ce sera la foule qui réclamera la mort de Jésus et la libération de Barabbas :
11 Ces derniers soulevèrent la foule pour qu’il leur relâche plutôt Barabbas.
12 Et comme Pilate reprenait : « Que voulez-vous donc que je fasse de celui que vous appelez le roi des Juifs ? »,
13 de nouveau ils crièrent : « Crucifie-le ! »
14 Pilate leur disait : « Qu’a-t-il donc fait de mal ? » Mais ils crièrent encore plus fort : « Crucifie-le ! »
15 Pilate, voulant contenter la foule, relâcha Barabbas et, après avoir fait flageller Jésus, il le livra pour qu’il soit crucifié. (Mc 15, 11-15)
Ce sont bien des gens qui veulent suivre Jésus et le voir comme Zachée, ils ont donc eux aussi un désir saint, mais ils n’en deviennent pas moins un écran, un obstacle (ce qui en grec se dit un scandale) pour les autres. Comment un homme seul pourrait-il vaincre une foule ?

Et nous ? Dans notre désir de voir Dieu, de connaître notre Dieu, savons-nous reconnaître et identifier les difficultés pour y remédier ?
Il y a des questions matérielles : connaissons-nous le message ou savons-nous où l’entendre et le recevoir, avons-nous du temps, de l’énergie… pour pouvoir chercher et suivre le Christ.
Il y a des questions personnelles : ai-je la motivation pour chercher, l’humilité pour me ranger derrière quelqu’un, la patience de ne pas décider où et quand se fera la rencontre, le courage de ne pas savoir comment elle arrivera et de recevoir les persécutions promises en même temps que la récompense finale… Et puis-je affronter mes propres peurs, péchés et contradictions qui m’éloignent si facilement de Dieu ?
Et les questions sociales : puis-je affronter l’indifférence ou l’hostilité des gens qui m‘entourent ? Puis-je répondre aux objections, aux doutes que formulent tant de gens autour de moi pour me décourager, puis-je surmonter les erreurs et les péchés des gens même les mieux orientés, qui parfois me donnent une mauvaise image de la foi, de l’amour de Dieu ?

04 Il courut donc en avant

La course montre l’empressement et l’énergie mobilisée pour arriver à ses fins. On a parlé tout à l’heure de la montée vers Jérusalem comme une image du progrès vers Dieu, aller de l’avant serait du même genre. Le Seigneur lui-même n’a-t-il pas dit :
62 Jésus lui répondit : « Quiconque met la main à la charrue, puis regarde en arrière, n’est pas fait pour le royaume de Dieu. »

Et nous, Cherchons-nous à aller de l’avant ou bien sommes-nous satisfaits de ce que nous sommes ou vivons, sans chercher à avancer. Ce serait alors oublier que personne n’est parfait ; se contenter de ce que nous sommes, c’est donc renoncer à s’approcher de Dieu, c’est un manque d’amour manifeste.
Y mettons-nous toute notre énergie, avec la certitude que rien n’est plus important que de chercher Dieu, avec la conviction que celui qui cherche Dieu trouve avec Lui les frères que Dieu lui donne et la manière de les aimer en vérité ? Avons-nous parfois tendance à être nostalgiques ou timorés ? À ne pas oser aller plus loin avec le Seigneur, pouvons-nous nous fixer dès aujourd’hui, avec les lumières de l’Esprit, l’étape suivante pour nous ? Que devons-nous faire pour progresser sur notre chemin de sainteté ?

et grimpa sur un sycomore pour voir Jésus qui allait passer par là.

Il ne faudrait pas croire que le sycomore est un grand arbre qui permet de monter haut et de voir de loin. C’est un arbre très répandu, une sorte de figuier sauvage, banal et sans richesse. Dans l’Ancien Testament, on en trouve la mention pour l’opposer au cèdre, arbre majestueux et précieux pour les belles constructions :
À Jérusalem, le roi fit abonder l’argent autant que les pierres, et les cèdres autant que les sycomores dans le Bas-Pays. (1R10,27)
Il est pourtant signe de rédemption et de conversion car sa vitalité étonnante lui fait repousser des branches autant de fois qu’on le coupe. Voici donc que celui qui s’appelle “Dieu se souvient” monte dans l’arbre surnommé “conversion” ou “rédemption”…
Par contre, cet arbre possède d’assez larges feuilles, ce qui permet à celui qui y est grimpé de se dissimuler à la vue de tous. Zachée, qui est publicain, ne veut pas se mettre en avant ; il ne grimpe pas sur le meilleur des arbres, il ne se montre pas. Il a anticipé le chemin de Jésus et se poste pour le voir sans être vu… Il fait preuve de discrétion, peut-être même d’humilité, et sûrement de prudence !

Et nous ? Pour avancer dans la sainteté, pour préparer notre rencontre, notre prochaine rencontre avec Dieu, savons-nous mobiliser nos qualités comme Zachée : prudence, humilité, discrétion, patience, anticipation et clairvoyance, désir courage et sans doute bien d’autres encore ? Et savons-nous nous servir de tout, même des choses les plus banales pour en faire des atouts et des moyens de nous approcher du Seigneur ?

05 Arrivé à cet endroit, Jésus leva les yeux

Voyez la réciprocité : Zachée fait un effort physique : il court et grimpe pour voir Jésus. De la même manière, Jésus fait un effort, il s’arrête et lève les yeux. Il répond ainsi à Zachée. Notez encore le côté cocasse : il faut lever les yeux pour voir l’homme de petite taille ; il voulait voir Jésus et c’’est Jésus qui lève les yeux vers lui ! Notons enfin le caractère improbable de l’événement : il est caché et justement personne ne veut le voir mais Jésus s’arrête et le cherche des yeux. C’est le juste qui cherche le pécheur ; il a une foule autour de lui mais il s’intéresse à celui qui est perdu… Comment ne pas se rappeler les deux premières paraboles du chapitre 15 de Saint Luc “dites paraboles de la miséricorde” : la brebis perdue (et le bon pasteur) et la drachme perdue. Ainsi, Jésus vit-il réellement devant la foule ce qu’il a annoncé et conseillé dans ses paraboles. Il est le miséricordieux par excellence, Il donne l’exemple, il est l’exemple à suivre.

Et nous ? Quel regard posons-nous sur nos frères ? Quel regard levons-nous vers Dieu ? Pouvons-nous nous rappeler d’une fausse image de Dieu que nous avions mais que nous avons su corriger ? Quelle joie cela nous a-t-il apporter ? Avons-nous aidé des frères à poser un nouveau regard sur notre Père ? Et sur nos frères ? Nous souvenons-nous d’un frère que nous savons avoir mal jugé ? Est-ce que cela nous sert de leçon pour ne pas recommencer ?

et lui dit : « Zachée, descends vite :

Il le connait par son nom ! Voici qui nous renvoie à un autre discours de Jésus. Un discours qui parle aussi de bon pasteur mais qui se trouve dans l’évangile de Saint Jean :
14 Moi, je suis le bon pasteur ; je connais mes brebis, et mes brebis me connaissent,
15 comme le Père me connaît, et que je connais le Père ; et je donne ma vie pour mes brebis.
16 J’ai encore d’autres brebis, qui ne sont pas de cet enclos : celles-là aussi, il faut que je les conduise. Elles écouteront ma voix : il y aura un seul troupeau et un seul pasteur. (Jn 10, 14-16)
Jésus connait ses brebis, il connait Zachée, il l’appelle par son nom.
Bien sûr, Zachée est un publicain, un pécheur qui, du fait même, n’est pas compté parmi les gens du peuple, est exclu. Mais Jésus a d’autres brebis qui ne font pas partie de l’enclos…
Zachée entend l’appel du Christ et se convertit ; il fait parties des brebis qui écoutent la voix du bon pasteur et désormais il rejoint le seul troupeau.
Et Lui, qui a couru en avant, s’entend dire “descend vite”. Jésus continue de répondre à son désir et de le rejoindre dans son entreprise, là où il en est de sa recherche de sa conversion (encore bien timide).

Et nous ? Savons-nous que Dieu nous connaît personnellement, L’avons-nous entendu nous appeler par notre nom ? Pourrions-nous témoigner d’au moins une fois où avec certitude, il nous a rejoint dans notre cheminement, accompagné, encouragé et appelé à changer ? Pouvons-nous témoigner de ce que cela a changé dans notre vie ?

aujourd’hui il faut que j’aille demeurer dans ta maison. »

Le “aujourd’hui” qui concerne Jésus, correspond au “vite” qui concerne Zachée. Il n’y a pas de délai ou de temps à perdre. Le Salut est toujours une urgence. Dieu ne put souffrir que nous restions loin de lui.
Mais cette phrase nous renvoie aussi à la promesse faite au bon larron :
aujourd’hui, avec moi, tu seras dans le Paradis.”
Il s’agit encore d’un aujourd’hui, il y a encore la proximité de Jésus, Zachée invite chez lui et Jésus invite le bon larron chez lui, au paradis. Il le fait parce que celui-ci avait demandé “souviens-toi de moi” et Zachée signifie “Dieu se souvient”…
Ne manque que le “il faut”, expression qui fut utilisée par Jésus pour annoncer sa passion :
31 Il commença à leur enseigner qu’il fallait que le Fils de l’homme souffre beaucoup, qu’il soit rejeté par les anciens, les grands prêtres et les scribes, qu’il soit tué, et que, trois jours après, il ressuscite. (Mc 8, 31)
Voici comment Jésus relie cette conversion de Zachée, le salut du bon larron et l’invitation à la conversion de tous les pécheurs…

Et nous ? Nous qui sommes pécheurs, nous savons-nous ainsi invités et désirés par Dieu ? Savons-nous que notre Salut, notre proximité et même intimité avec Dieu est dans l’ordre des choses : il le faut !
Depuis le jour de notre baptême, nous sommes devenus des temples de Dieu, temple de l’Esprit qui habite en nous, ce jour-là, Dieu a dit “il faut que j’aille demeurer dans ta maison, dans ton cœur« . Il le répète sans cesse mais entendons-nous cette voix ?

06 Vite, il descendit et reçut Jésus avec joie.

Jésus a dit “descend vite” et “vite il descendit”. Nous avons vu comment Jésus répond point par point à l’initiative et au désir de Zachée. Nous le voyons lui aussi répondre, à la perfection, à l’appel de Dieu. Mais cela ne suffit pas : il le fait bien, il le fait aussitôt, mais surtout il le fait avec joie. Ecoutons Jésus nous parler de la joie :
09 Comme le Père m’a aimé, moi aussi je vous ai aimés. Demeurez dans mon amour.
10 Si vous gardez mes commandements, vous demeurerez dans mon amour, comme moi, j’ai gardé les commandements de mon Père, et je demeure dans son amour.
11 Je vous ai dit cela pour que ma joie soit en vous, et que votre joie soit parfaite. (Jn 15, 9-11)
Ainsi la joie est d’abord la joie de Jésus. Cette joie vient de l’amour du Père. Comme le père aime, et que le Christ aime le Père, il est dans la joie. La joie est donc un fruit de l’amour de Dieu, du Père pour le Fils et du Fils pour le Père.
Et comme les disciples, ceux qui gardent les commandements, demeure dans l’amour du Christ, ils reçoivent en eux cet amour et donc sa conséquence, son fruit, la joie.
Zachée obéit au commandement de Jésus, bien que pécheur il éprouve donc, non à cause de ce qu’il fait mais de ce qu’il aime, la joie qui vient du Christ.
On trouve aussi, toujours dans l’Evangile de Saint Jean :
22 Vous aussi, maintenant, vous êtes dans la peine, mais je vous reverrai, et votre cœur se réjouira ; et votre joie, personne ne vous l’enlèvera. (Jn 16, 22)
La peine vient de la passion et de la mort du Christ, mais ils le reverront, Il ressuscitera. Alors reviendra la joie et une joie san fin. Il y a donc un lien entre la vie du Christ et la joie. Les disciples vivaient avec lui, ils étaient dans la joie, il va mourir, ils seront privés de joie, ressuscités. Il ne mourra plus et leur joie ne sera plus ravie par qui que ce soit. La corrélation est ici entre joie et vie du Christ, mais en tant que nous participons et partageons cette vie quand nous sommes ses disciples. La rencontre du Christ est source de joie, ce qui arrive à Zachée, mais l’intimité avec le Christ, dans le bonheur comme dans les épreuves, jusqu’à la Croix et au tombeau est cause d’une joie san fin, plus forte que la mort, éternelle !

Et nous ? Que cherchons-nous ? Les plaisirs de ce monde ou la joie qui vient de Dieu ? La joie de la rencontre intense mais fugace ou la joie de l’intimité, plus âpre mais éternelle ?

07 Voyant cela, tous récriminaient : « Il est allé loger chez un homme qui est un pécheur. »

C’est l’éternelle critique. Rappelons-nous l’introduction de la parabole du pharisien et du publicain lue la semaine dernière :
09 À l’adresse de certains qui étaient convaincus d’être justes et qui méprisaient les autres, Jésus dit la parabole que voici… (Lc 18, 9)
C’est bien de cela qu’il s’agit. Tous se croient juste, tous méprisent Zachée qui est si différent d’eux. Nous connaissons bien la réponse de Jésus :
31 Jésus leur répondit : « Ce ne sont pas les gens en bonne santé qui ont besoin du médecin, mais les malades.
32 Je ne suis pas venu appeler des justes mais des pécheurs, pour qu’ils se convertissent. » (Lc 5, 31-32)
Et plus explicite encore la version de saint Matthieu :
11 Voyant cela, les pharisiens disaient à ses disciples : « Pourquoi votre maître mange-t-il avec les publicains et les pécheurs ? »
12 Jésus, qui avait entendu, déclara : « Ce ne sont pas les gens bien portants qui ont besoin du médecin, mais les malades.
13 Allez apprendre ce que signifie : Je veux la miséricorde, non le sacrifice. En effet, je ne suis pas venu appeler des justes, mais des pécheurs. » (Mt 9, 11-13)
Plus explicite car le Seigneur renvoie au cœur (la miséricorde) et donc à la personne et à son mode vie, plutôt qu’à la loi (les sacrifices) c’est à-dire des actions ponctuelles et extérieures qui n’influencent pas toujours la façon de vivre.
Bien sûr, il ne s’agit pas de nier que Zachée soit un pécheur : il l’est, c’est un fait. Il s’agit de comprendre que nous le sommes-tous, et que le plus grand péché est de ne pas se savoir pécheur et de se croire ainsi autorisé à juger les autres, les pécheurs. C’est ce que Jésus fait comprendre à ceux qui lui ont amené la femme adultère :
“il se redressa et leur dit : « Celui d’entre vous qui est sans péché, qu’il soit le premier à lui jeter une pierre. »
La lettre de saint Jacques l’explique aussi clairement :
11 Frères, cessez de dire du mal les uns des autres ; dire du mal de son frère ou juger son frère, c’est dire du mal de la Loi et juger la Loi. Or, si tu juges la Loi, tu ne la pratiques pas, mais tu en es le juge.
12 Un seul est à la fois législateur et juge, celui qui a le pouvoir de sauver et de perdre. Pour qui te prends-tu donc, toi qui juges ton prochain ? (Jc 4, 11-12)

Et nous ? Avons-nous conscience de notre péché ? Est-ce que cela développe notre patience et notre compassion vis-à-vis des péchés des autres ? Sommes-nous capables de comprendre la différence entre juger des actes et des personnes ? Aurions-nous pu dire de Zachée “ce qu’il a fait est mal, mais lui, c’est mon frère. Pourvu que le Christ sache le toucher et le convertir… et qu’ainsi à mon tour, moi qui ne suis aussi qu’un pécheur, je sois converti par ce signe et sauvé par mon Seigneur”.

08 Zachée, debout,

La position debout n’est pas anodine. Elle signifie la vigueur mais aussi le fait d’être relevé par Dieu. Avant de rencontrer le Christ, Zachée est assis dans son arbre, caché de tous car il a honte de ce qu’il est : un pécheur. Maintenant, il est debout au milieu de tous et devant le Seigneur. Pourtant il est toujours pécheur et il le sait puisqu’il va confesser son péché (en promettant de le réparer). Mais c’est un pécheur qui a entendu en lui résonner l’appel de Dieu, un pécheur qui accueille le Seigneur. C’est le Seigneur qui justifie et personne d’autre.

Et nous ? Nous savons que nous sommes tous pécheurs quoique nous essayons de faire, mais nous pouvons nous tenir debout, non à cause de notre force ou de nos mérites, mais de la miséricorde de Dieu et de sa douceur qui nous comblent de sa force et même nous l’avons vu de sa joie. Voilà pourquoi il est si beau de savoir prier avec son corps, notamment à la messe : debout pour accueillir avec force le Seigneur dans sa Parole ou dans l’Eucharistie, assis pour méditer et se recueillir, à genoux pour demander pardon ou pour adorer… chaque position nous révèle une œuvre différente de Dieu en nous, et confirme notre attitude adaptée à la grâce de Dieu ?

s’adressa au Seigneur : « Voici, Seigneur : je fais don aux pauvres de la moitié de mes biens,

Zachée parle au Seigneur. Lui, l’homme qui se cachait et voulait seulement voir, il se montre, il accueille et il parle. Voyez comment le Seigneur a dépassé ses attentes. Mais cela n’est pas sans difficulté ou efforts pour Zachée car maintenant, il va devoir se détacher de ses richesses, s’occuper de ceux qu’il n’hésitait pas à rançonner auparavant. Il apprend, lui le riche, à voir les pauvres ; il apprend, lui le voleur qui prenait, à donner et partager. C’est une véritable conversion, un retournement du tout au tout.
L’invitation au partage est une constante de l’évangile et peut être surtout de l’évangile de Saint Luc. En voici quelques exemples :
Dans la bouche de Jean Baptiste :
11 Jean leur répondait : « Celui qui a deux vêtements, qu’il partage avec celui qui n’en a pas ; et celui qui a de quoi manger, qu’il fasse de même ! » (Lc 3, 11)
Durant le discours sur la montagne
30 Donne à quiconque te demande, et à qui prend ton bien, ne le réclame pas. (Lc 6, 30)
Et
34 Si vous prêtez à ceux dont vous espérez recevoir en retour, quelle reconnaissance méritez-vous ? Même les pécheurs prêtent aux pécheurs pour qu’on leur rende l’équivalent.
35 Au contraire, aimez vos ennemis, faites du bien et prêtez sans rien espérer en retour. Alors votre récompense sera grande, et vous serez les fils du Très-Haut (Lc 6, 34-35)
La parabole du riche insensé se termine par :
Dieu lui dit : “Tu es fou : cette nuit même, on va te redemander ta vie. Et ce que tu auras accumulé, qui l’aura ?”
21 Voilà ce qui arrive à celui qui amasse pour lui-même, au lieu d’être riche en vue de Dieu. » (Lc 12, 20-21)
Et un peu plus loin dans le même discours que cette parabole :
33 Vendez ce que vous possédez et donnez-le en aumône. Faites-vous des bourses qui ne s’usent pas, un trésor inépuisable dans les cieux, là où le voleur n’approche pas, où la mite ne détruit pas. (Lc 12, 33)
Au jeune homme riche :
Jésus lui dit : « Une seule chose te fait encore défaut : vends tout ce que tu as, distribue-le aux pauvres et tu auras un trésor dans les cieux. Puis viens, suis-moi. » (Lc 18, 22)
Et à saint Pierre aussitôt après :
29 Jésus déclara : « Amen, je vous le dis : nul n’aura quitté, à cause du royaume de Dieu, une maison, une femme, des frères, des parents, des enfants,
30 sans qu’il reçoive bien davantage en ce temps-ci et, dans le monde à venir, la vie éternelle. » (Lc 18, 29-30)
Et à propose de la pauvre veuve
03 Alors il déclara : « En vérité, je vous le dis : cette pauvre veuve a mis plus que tous les autres.
04 Car tous ceux-là, pour faire leur offrande, ont pris sur leur superflu mais elle, elle a pris sur son indigence : elle a mis tout ce qu’elle avait pour vivre. » (Lc 21, 3-4)
Ainsi, et sous bien des formes, l’évangile rappelle que le partage de ses biens est un signe de notre conversion, ce que Zachée fait en premier quand il change de vie.

Et nous ? De quelle façon partageons-nous avec nos frères ? Où en sommes-nous dans nos aumônes ? Avons-nous trouvé des moyens concrets de nous détacher de nos richesses et de nous faire un trésor dans les cieux ?

et si j’ai fait du tort à quelqu’un, je vais lui rendre quatre fois plus. »

Ne nous y trompons pas, il ne s’agit plus de partage. Il est question ici de justice et donc de réparation. Mais comme il y a eu vol et donc faute, il ne saurait être question de rendre un pour un, ce serait trop simple. Voici ce que disait la loi à ce sujet :
37 « Si un homme vole un bœuf ou un mouton, et qu’il abatte ou vende la bête, il fournira en compensation cinq têtes de gros bétail pour un bœuf ou quatre têtes de petit bétail pour un mouton. (Ex 21, 37)
Et quelques versets plus loin :
03 Si la bête volée – bœuf, âne ou mouton – est retrouvée vivante entre ses mains, il fournira en compensation le double de sa valeur. (Ex 22, 3)
Nous le voyons, le fait de rembourser quatre fois plus vient directement d’un commandement biblique. Zachée ne se convertit pas seulement pour faire du bien à ses voisins, il ne s’agit pas d’une conversion “sociale” où il apprendrait à vivre en bonne harmonie. Il s’agit de se conformer à la loi et de vivre selon la volonté de Dieu, aussi exigeant que cela puisse être.
Notons qu’il aurait pu estimer posséder toujours l’argent et se contenter de rembourser deux fois comme le dit la dernière citation, mais il choisit la réparation maximale, signe de son repentir véritable et de son désir d’être totalement en accord avec la loi de Dieu.

Et nous ? Est-ce que nous essayons d’entendre la volonté de Dieu et de faire selon sa miséricorde, ou bien est-ce que nous essayons de nous en tirer à moindre frais en nous arrangeant avec nos plus proches ? Que cherchons-nous : la sainteté ? La justice ? La tranquillité ? La facilité ?

09 Alors Jésus dit à son sujet : « Aujourd’hui, le salut est arrivé pour cette maison,

Voyons de quoi parle Jésus : il parle de Salut et non d’honnêteté ou de je ne sais quelle valeur. Pourquoi ?
Tout d’abord parce qu’il ne parle pas de comportement ou de bien matériel. Ce qui est “arrivé pour cette maison” c’est lui et d’abord lui. Il ne s’agit donc ni de valeur, ni d’engagement, pas même d’action ou de partage, mais d’abord d’une personne, Lui, le Christ. Cette personne change tout et tous et bouleverse les habitudes, et Zachée en est le premier témoin. Mais, ce qu’il fait et promet, n’est que le signe d’autre chose et cette autre chose est la présence aimante et sanctifiante de Dieu dans cette maison.
Mais il faut aussi comprendre que cette présence du Christ, d’un point de vue matériel et charnel ne durera qu’une journée et le temps d’un repas. Mais d’un point de vue existentiel et spirituel, parce que désormais Zachée vit de l’obéissance à la loi et de l’amour du Christ, il l’aura au cœur pour toujours et le changement arrivé dans le temps le fait surtout entrer dans l’éternité.
Rappelons-nous ce que nous avons dit du bon larron quelques phrases plus haut. C’est encore un “aujourd’hui” qui est évoqué. Et reconnaissons que d’entendre “tu seras avec moi dans le paradis” ou d’entendre “le salut est arrivé pour ta maison” est à peu de chose près synonyme.

Et nous ? Sommes-nous prêts à faire de toute notre vie une recherche et un accueil de cette présence sanctifiante de Dieu en nous ? Est-il celui qui comblera nos vies et nos cœurs ? Est-ce que Dieu seul nous suffit ?

car lui aussi est un fils d’Abraham.

On trouve plusieurs mentions de ces fils d’Abraham dans l’évangile : la première peut sembler négative :
09 N’allez pas dire en vous-mêmes : “Nous avons Abraham pour père” ; car, je vous le dis : des pierres que voici, Dieu peut faire surgir des enfants à Abraham. (Mt 3, 9)
Les juifs tenaient en grande estime leur titre de fils d’Abraham. Jésus leur montre qu’un titre n’est rien devant la toute-puissance de Dieu. Il ne minimise pas l’importance de descendre d’Abraham ; ce qu’il minimise, c’est l’aspect matériel de cette dépendance. Mais si c’est pour être les dignes héritiers de la foi du patriarche, au contraire, ce sera très important, si important que Jésus contemplant cela de manière mystérieuse, enfouie au cœur de Zachée, travaille à refaire de lui explicitement un fils d’Abraham dans la foi, et donc un sauvé.
Marie aussi d’une certaine manière évoque ces fils d’Abraham dans son magnificat :
il se souvient de son amour,
55 de la promesse faite à nos pères, en faveur d’Abraham et sa descendance à jamais. » (Lc 1, 54-55)
La descendance d’Abraham ou les fils d’Abraham, c’est bien la même chose. Marie promet que Dieu s’en souviendra (c’est le nom Zachée qui est encore une fois-là derrière : Dieu se souvient” : Jésus l’a donc fait pour cette maison en ce jour-là.
Et à propos de la femme, courbée, guérie par Jésus :
16 Alors cette femme, une fille d’Abraham, que Satan avait liée voici dix-huit ans, ne fallait-il pas la délivrer de ce lien le jour du sabbat ? »
Cette fois-ci, le titre fille d’Abraham est là pour insister sur sa valeur bien supérieure au bœuf ou à l’âne qui pourtant sont déliés du sabbat pour aller boire.
Ces quelques éléments (on pourrait ajouter la parabole du riche et du pauvre Lazare où Abraham est toujours appelé “père Abraham”) montrent à la fois que le titre est important mais seulement s’il correspond à une réalité qui est l’héritage ou la succession dans la foi. A la foule qui s’en déclare issue et se reconnaît sûrement dans l’appellation “fils d’Abraham”, Jésus oppose le publicain qui est pécheur mais reçoit de Dieu la reconnaissance de sa filiation parce qu’il a accueilli le Christ, parce qu’il a la foi.
Il y a donc ici d’une certaine manière un glissement : les fils d’Abraham sont ceux qui croient au Christ et qui l’aiment, des fils par la foi plutôt que ceux qui peuvent revendiquer la lignée du patriarche mais ne vivent pas de sa foi en ne reconnaissant pas le Christ en Jésus. Cette relégation du charnel, nous l’avions déjà eue lors de la rencontre en Jésus et sa famille :
il leur répond : « Qui est ma mère ? qui sont mes frères ? »
34 Et parcourant du regard ceux qui étaient assis en cercle autour de lui, il dit : « Voici ma mère et mes frères.
35 Celui qui fait la volonté de Dieu, celui-là est pour moi un frère, une sœur, une mère. » (Mc 3, 33-35)

Et nous ? Allons-nous nous cacher derrière des titres pour nous éviter de nous convertir ? Dirons-nous “je suis chrétien” ou “je suis baptisé” pour nous rassurer ? Ou, au contraire, est-ce que nous essaierons de vivre ce que signifie ces titres pour qu’ils gardent leur beauté et leur valeur ? Nos vies seront-elle l’illustration digne de ce que signifie être chrétien, être baptisé, être fils de Dieu et frère du Christ ? Pouvons-nous nous entrainer à résumer et présenter ce que signifie pour nous ces titres et ainsi mieux estimer ce qu’il nous faut faire pour en être dignes, pour correspondre au plan de Dieu sur nous ?

10 En effet, le Fils de l’homme est venu chercher et sauver ce qui était perdu. »

Une telle formule nous renvoie, une fois de plus, vers les deux premières paraboles du chapitre 15 de saint Luc : la brebis était perdue, le bon berger l’a cherchée et sauvée ; la drachme était perdue et elle est retrouvée. Le père de la troisième parabole, celle dite du fils prodigue, prend aussi cette comparaison :
“ton frère que voilà était mort, et il est revenu à la vie ; il était perdu, et il est retrouvé !” (Lc 15, 32)

Et nous ? Pour nous, cela signifie une chose : tant que nous n’accepterons pas que nous sommes perdus, nous ne pourrons pas laisser le Seigneur nous trouver, nous sauver, nous ramener…
C’est tout le problème évoqué plus haut de ceux qui récriminent ou encore de ceux à qui est destinée la parabole du pharisien et du publicain “ceux qui se croient justes et qui méprisent les autres” (Lc 18, 9)

En guise de conclusion :
la belle histoire que nous lisons est à première vue celle d’un pécheur qui, croisant la route du Christ, ne veut plus pécher et s’engage à vivre honnêtement. Mais en fait, elle va beaucoup plus loin. Il s’agit de voir comment l’irruption dans un cœur de l’amour infini tout puissant et miséricordieux de Dieu peut le transformer. Il s’agit de comprendre qu’au-delà des valeurs et d’honnêteté, il est question d’amour, de rencontre de personne, du choix de l’obéissance dans la confiance, du service docile à son Dieu et aux frères pour Dieu.
Mais il nous faut aussi avec lucidité nous rendre compte de notre facilité à juger et condamner, nous coupant ainsi de l’amour miséricordieux qui, seul, peut nous sauver. Il nous faut réaliser comme il est plus facile de sauver les apparences et de nous contenter d’une certaine médiocrité que nous excusons et justifions parce que nous regardons les choses et non les personnes, le monde et non plus Dieu.
Zachée n’a pas fait le seul choix de vivre correctement au milieu de ses frères, il a choisi Dieu et lui avant tout, saurons-nous en faire autant ?